Je suis allée faire un petit reportage pour animOgen chez un passionné de canards, bernaches, grues et faisans. il est ce que l'on appelle vulgairement "un collectionneur".
J'ai passé une matinée formidable à comprendre comment l'œuf devient canard en captivité.
Cette personne possède une soixantaine d'espèces de canards, qui pour la plupart sont très rares,disséminées sur une dizaine de bassins, dans plusieurs hectares clos de murs.
Après l'accouplement, la cane pond entre 5 et 12 œufs en fonction des espèces, dans des nichoirs disposés à cet effet autour des bassins.
Il faut alors récupérer les œufs et les déposer délicatement sous une poule qui couve, en lui ayant au préalable retiré les siens.
Ces petites poules sont issues de nombreux croisements effectués par mon hôte pendant plusieurs années. Elles sont très légères pour ne pas casser les œufs, et ont beaucoup de duvet, pour garder une chaleur constante lors de la couvaison.
Après quelques jours sous la poule, il faut mirer les œufs à l'aide d'une lampe de poche que l'on place sous l'œuf. Lorsque l'œuf est clair, on ne voit que la lumière, mais lorsqu'il y a un petit point noir (l'embryon) ou un dessin en forme d'araignée à l'intérieur c'est qu'il est fécondé.
Si on mire l'œuf à nouveau au bout de 27 jours, on peut s'apercevoir que les deux tiers sont de couleur sombre, et qu'il y a une poche d'air au dessus: le caneton ne va pas tarder à sortir.
Une fois éclos, le caneton passera 2 jours sous sa poule et partira pour la pouponnière, où il sera éjointé. Cette opération est indolore, car elle est effectuée au 3ème jour, lorsqu'il n'y a pas encore d'afflux sanguin dans la partie coupée. L'éjointement évite à plus de 50 % des canards de se faire tuer au moment de la chasse, et a permis de résoudre les problèmes de confinement au moment de la grippe aviaire.
Dans la pouponnière, les canetons sont chouchoutés avec eau courante, lampe chauffante et radio, pour s'habituer au bruit.
Certaines espèces, comme l'Eider, ont beaucoup de mal à sécréter l'huile qui leur permet d'imperméabiliser leur plumage, et le passage en pouponnière est indispensable. Cette huile est fabriquée par une glande située en bas du dos, que l'on appelle la glande uropygienne. Dans la nature, il n'est pas rare que la canne frotte son bec sur sa glande puis sur ses canetons pour les imperméabiliser les premiers jours, afin d'éviter les noyades.
Une quinzaine de jours après ce passage en pouponnière, les petits partent pour la nurserie à l'air libre, avec des bassins un peu plus grands mais peu profonds où ils seront bagués.
Chaque caneton est bagué et les numéros de bague sont consignés dans un registre vérifié régulièrement par la DDSV.
Au fur et à mesure qu'ils grandissent, les installations sont retirées, pour leur laisser plus de place et de profondeur dans les bassins.
Mon hôte a souhaité rester dans l'anonymat, mais je le remercie d'avoir accepté de de me faire découvrir cet univers passionnant.
Ce monsieur consacre énormément de temps à la sauvegarde des espèces menacées, et fait régulièrement des voyages dans le monde pour transmettre son savoir.
Il agit actuellement en collaboration avec les autorités chinoises pour la réintroduction du Tragopan au Tibet.
Ses 3 couples étant en pleine mue, il ne m'a pas été accordé de les déranger, mais un rendez-vous est pris pour septembre, pour un reportage sur ce bel oiseau. Un petit avant goût cependant.
Source : Maud